L'Unité Juive par l’amour et le respect
A’harei Mot-Kedochim - Lévitique 16:1 - 20:27


Les Juifs font face à un défi extraordinaire, en Israël et dans le monde. Il y a les vues contraires de ce qui doit être fait, en termes de progression par petits pas, ou des buts que nous devons viser et surtout que nous cherchons à atteindre : la paix et la justice sociale, la sérénité communautaire et l'action politique juste. Il y a le chagrin pour les victimes et leurs familles et il y a l'horreur et le dégoût face à l'image que les médias ont en grande partie forgée d'Israël en le transformant en un bouc émissaire. Un point, cependant, est clair. Nous, les Juifs, devons être unis, nous devons agir et réfléchir ensemble. Comment l'avenir serait -il encore possible si les membres de nos propres communautés ne se soutiennent pas, lorsqu'il y a conflit et que nous sommes tous capables d'avoir que des avis exclusifs ?

Les enseignements de la Torah fournissent un modèle d'une unité spirituelle qui dépasse des différences. Ce modèle fonctionne non seulement en termes des gens divers, mais même en ce qui concerne le rapport du peuple avec l'Éternel. C'est en fait le thème principal de la première section de cette double Sidra A’haré mot, [Lévitique ch.XVI-18, XIX-20] ,que nous lisons cette semaine, qui décrit les détails du service de la journée de Yom Kippour.

Regardons le concept de Yom Kippour dans une perspective large, et plus générale. La particularité centrale de la Torah, située dans l'ensemble du corps de Loi émanant du Sinaï, se présente à nous comme un pacte sacré avec le peuple d'Israël. Le mot Torah lui-même signifie 'instruction', et la Torah écrite, avec ses explications dans la Torah Orale [plus tard noté dans la forme de la Michnah et Talmud.] fournissent les règles détaillées : comment accomplir notre partie du pacte en tant qu'individu et tant que société.

Ainsi cela tout semble clair. L’Eternel nous fournit beaucoup d'information sur le comportement des individus (tout particulièrement le peuple juif), dans tous les aspects de notre vie et nous suivons avec obéissance ses conseils. La question est bien : le faisons - nous ? Non, pas toujours ! En fait nous ignorons souvent l'enseignement thoraïque ou faisons même l'opposé. Donc cela ne signifie - il pas que nous sommes condamnés à être en désaccord avec l'Éternel ? Non , pas nécessairement !

C'est là où le thème de Yom Kippour entre en jeu. Malgré nos déviances évidentes ou occasionnelles, en matière de gestes, de rites et d'attitudes face à notre prochain, il y a un niveau dans notre rapport avec l'Éternel qui est au-delà de ces différences, où nous regagnons notre pureté et notre innocence. Yom Kippour révèle ce niveau.

Yom Kippour produit cet effet annuellement, comme un événement remarquable, un jour unique dans l'année. Encore pendant l'année et particulièrement maintenant quand nous le lisons dans la Torah le Chabbat, Yom Kippour nous rappelle la qualité d'alliance particulière que nous avons avec l'Éternel, laquelle se situe à un niveau plus haut encore que nos erreurs et nos limitations. "LIFNÉ ADONAY TITHAROU, Vous serez purifiés devant l'Éternel" [Lev. XVI : 30]. Quand nous atteignons le niveau qui est près du divin, toutes nos impuretés disparaissent. Nos différences sont oubliées et tout revient et se forge dans l'Unité. Ce niveau glorifié exprime le pouvoir du Repentir, de la techouva, qui nous donne la force de changer nos habitudes liées au quotidien, afin de nous unir aux enseignements du Divin, que ce soit le jour de Yom Kippour ou n'importe quel autre moment de la vie.

Si nous pouvons nous joindre à l'Éternel de cette façon, nous pouvons aussi nous joindre à nos frères. Ceci est exprimé dans la seconde Sidra, avec son enseignement célèbre : "veahavta leréaha kamoha, ani Adonay elohèkha", Tu aimeras ton prochain comme toi - même, je suis l'Éternel ton Dieu. [Lev XIX : 18].

La forme grammaticale employée dans le texte en hébreu n'est pas la même que celle employée dans le verset "Tu Aimeras ton Dieu" qui est VEAVHTA ET ADONAY, mais précisément VEAHAVTA LEREAHA, que l'on pourrait traduire par "tu aimeras, en allant vers ton prochain"

 

L'accent étant mis sur les actes et le comportement plus que sur les sentiments. Aimer son prochain c'est avant tout s'abstenir de lui faire du mal., Hillel le traduit par "ne fais pas à autrui ce que tu ne veux pas qu'on te fasse. Voilà toute la Thora, le reste n'est que commentaire" Talmud de Babylone, Chabbat 31. Et c'est aussi l'empêcher de faire du mal.

Notre histoire individuelle s'inscrit dans l'histoire du monde, il est donc impossible de juger ce qui est bon pour l'autre, et même pour soi, ne dit - on pas "Il y a des richesses qui sont gardées pour être données à certains pour leur plus grand malheur". (Ecclésiaste). Seule la connaissance de la loi permet de ne pas se tromper ; et même si son application n'est pas dictée par un amour spontané envers l'autre, il devient un véritable amour de Dieu.

Selon Rachi, prochain et Dieu sont désignés par le même mot. La reconnaissance de Dieu permet d'aimer l'autre. Aimer l'autre, c'est aimer Dieu. L'amour altruiste est une invention de la Thora. Il ne s'agit pas d'aimer son prochain dans le but d'être aimé, mais « parce que je suis l'Eternel ». Les humains méritent d'être aimé parce qu'ils ont été créés à Son image. Chaque commandement porte en lui une transcendance qui va modifier le réceptacle qu'est l'homme, son égo va se refermer pour laisser la place à l'autre, c'est le dépassement de soi.

La connexion avec l'Éternel nous aide à aller au-delà des différences qui existent entre nous et notre voisin. Indépendamment de la différence d'opinions nous nous tenons - dans nos coeurs nous sommes unis, et nous devons le rester. En effet, Rabbi Akiva a dit que ce concept d'amour et l'unité est le grand principe de la Torah : "ze klal gadol batora" C'est aussi le secret suprême de notre force.

Prions l'Éternel pour le bien-être des Juifs, des communautés juives dans le monde face aux épreuves qu'elles endurent. Prions pour l'État d'Israël à qui nous souhaitons un bon anniversaire pour ses 69 ans d'existence ou de survie, en sachant bien que notre vrai but dans le monde est le bien-être et le bonheur de toute l'humanité. Oui, par le Tikoun olam, la réparation du monde, c'est par le travail de notre esprit et de nos actions que le monde connaîtra un raffinement profond. Sachons redevenir UN. Comme l'explique le Zohar : "AHAVA chava EHAD, l'amour construit l'unité."

Rabbin Michel Liebermann
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