Et Je résiderai parmi eux...
Terouma - Exode 25 :1 – 27 :19


D.ieu a donné à Moïse le décalogue et les michpatim, les règles… Voilà, qu’il vient lui prescrire de construire le Tabernacle.

 

« (1) L’Éternel parla à Moïse en disant : (2) Parle aux enfants d’Israël, et qu’ils prennent pour Moi un prélèvement ; de la part de toute personne qui y sera portée par son cœur, vous prendrez Mon prélèvement. (…)
(8) Ils Me feront un Sanctuaire, et Je résiderai parmi eux, (9) selon tout ce que Je te montre, le modèle du Tabernacle et le modèle de tous ses ustensiles, et c’est ainsi que vous ferez ».

 

Ce texte commence sur deux éléments intéressants à souligner tant la formulation est riche de sens. L’Eternel, alors qu’il demande une offrande, D.ieu dit à Moïse « qu’ils prennent pour Moi un prélèvement ». Cette formulation est originale en ce que, contrairement à son habitude, D.ieu ne dit pas à Moïse ce qu’il doit dire au peuple d’Israël. D.ieu se faisant demande à Moïse d’agir en chef, en leader : trouve les mots afin que ton peuple fasse allégeance et me montre celle-ci par une offrande. Et, là encore, si D.ieu dit sous quelle forme cette offrande peut être faite – en vue de la construction du Tabernacle – il ne la définit pas. Il attend que chacun lui fasse une offrande qui « y sera portée par son cœur ». Ainsi, pour que l’offrande ait une réelle valeur, il convient que celle-ci vienne du cœur, si elle est offerte volontairement, en toute liberté.

 

La foi n’a alors de beauté que si elle est volontaire et ne saurait être commandée, exigée. La foi est un acte de libre arbitre et c’est le cœur libre que chaque juif doit en donner la preuve. Mais comme un auteur le souligne, cela met en exergue « le génie dont Moïse devait faire preuve pour transmettre la Torah comme Loi. Transmettre un projet de valeurs, extérieur, transcendant de la volonté des hommes mais de telle manière que son accomplissement relève d’un mouvement du cœur : amener l’homme à vouloir, de par lui-même, ce que D.ieu veut. C’est là la condition de l’authenticité ultime de l’accomplissement de tout commandement de la Loi ».

 

Cette paracha, ainsi que les quatre suivantes, relate par le menu les modalités de construction du Tabernacle par le peuple d’Israël. Avant la construction du mikdash, depuis Abaham et Isaac, avec Isaac et même Moïse, les hébreux vouaient un culte à D.ieu en haut des collines, sur les rives des cours d’eau, là où leur cœur les rendait enclins à prier.

Dans le commandement de construire le Sanctuaire, D.ieu ne dit pas « Je résiderai en lui » (dans le Sanctuaire) mais « en eux ». Les penseurs juifs expliquent que cela signifie que D.ieu réside dans le cœur de chaque Juif. Ainsi chaque personne est sacrée, et la maison dans laquelle elle réside l’est également. Mais pourquoi D.ieu qui pouvait être prié partout, demande à ce que lui soit consacré un temple, limitant quelque part sa présence ?

 

D’aucuns ont considérés que l'Eternel craignait qu'après cette manifestation grandiose que fut la Révélation au Sinaï le peuple d'Israël ne se croie abandonné par Dieu. II redoutait, qu'à l'instar de ce qui s'était passé avec le veau d'or, les enfants d'Israël se laissent entraîner à confectionner eux-mêmes une sorte de représentation de Dieu pour mieux se sentir en sécurité et mieux ressentir la proximité de Dieu. Ainsi D.ieu, connaissant les faiblesses des hommes, ayant pris conscience qu'il fallait au peuple un symbole, même modeste, qui puisse rappeler et situer la présence de Dieu au milieu de leur camp, exigea la construction du Tabernacle. Ainsi, il ne réside pas en lui (le Temple) mais parmi eux (les enfants d’Israël) afin de leur rappeler l’Alliance, de conserver la Loi et leur offrir un lieu de Sainteté, séparé du reste, où pouvoir abriter les offrandes et les prières offertes à D.ieu.

De plus, l'Eternel tenait à ce que le peuple tout entier ait sa part dans l'édification de sa maison : un peuple c’est une histoire et des épreuves communes. Aussi, le texte montre que D.ieu voulait que tout un chacun puisse y participer par un don personnel, ait de la sorte l'impression de bâtir de ses propres mains une demeure pour l'Eternel et en vienne à considérer réellement la maison de D.ieu comme sa propre maison à lui. Ayant contribué à donner à D.ieu un « abri » dans son camp, le peuple d'Israël était mieux à même de se sentir en confiance avec l'Eternel, de vivre en intimité avec lui, de recevoir avec joie ses instructions et ses encouragements, de percevoir à ses côtés un père à la fois tendre et ferme.

Le Sanctuaire ou le Temple possédait trois caractéristiques fondamentales. Tout d’abord, le Temple est une source de connaissance de la Torah. Ainsi, c’est dans le Saint des Saints que sont conservées les Tables de la Loi. De plus, dans la tradition, il est classique de lire que lorsque Moïse eût fini l’écriture du rouleau de la Torah, celui-ci fut placé dans le Saint des Saints. Ensuite, le Temple est appelé une « Maison de Prière » et constitue la Porte du Ciel, car toutes les prières dirigées vers D.ieu passent par cette Maison. C’est pour cela que quel que soit le siècle ou le lieu, les juifs se tournent toujours vers le Temple de Jérusalem en priant. Enfin, selon les prescriptions, il y avait dans le Temple la Table d’or sur laquelle étaient posés douze pains. Cela exprime le fait que D.ieu envoie un flux de bénédictions dans le monde pour pourvoir aux besoins de chaque créature, comme il l’a fait dans le désert avec la manne.

Tous les détails que donne la Torah quant à la construction est source de débats nourris.

Pour certains, la description du mikdash n’est pas contenue dans la Torah originale mais a fait l’objet d’une intégration postérieure au récit de l’Exode par les prêtres dans le but de légitimer l’existence du Temple de Jérusalem. Au fondement de cette théorie, ces commentateurs soulignent que nombre des matériaux évoqués dans la paracha n’étaient pas en usage au moment où le peuple errait dans le désert.

Pour d’autres, le Mikdash est l’une des premières institutions israélites : celle-ci a été effectivement ordonnée par D.ieu même si, par la suite, les auteurs de la Torah ont pu exagérer les détails de sa construction et sur les matériaux, dont la symbolique était de marquer l’importance de cet acte fondateur.

Comme toute chose en matière de foi, la réponse ne nous est pas donnée et nul ne sait si le Tabernacle fut tel qu’il est décrit dans cette paracha, ni même s’il a effectivement existé… Mais est-ce vraiment là que réside l’essentiel ? L’essence de cette paracha c’est que D.ieu réside parmi le peuple juif.

Faut-il alors un sanctuaire pour éprouver la présence divine ? Le culte doit-il nécessairement être rendu dans un sanctuaire pour que notre âme fasse l’expérience de D.ieu ? D.ieu n’était-il pas là déjà et doit-il avoir sa maison « beit hamikdash » ?

La tradition juive nous montre pourtant que nous pouvons rencontrer de D.ieu de maintes man*ières et dans maints lieux. Ainsi, dans chaque détail de la Création, la beauté et les mystères de la nature, dans la vie qui naît et croît en nous pour faire naître un enfant, dans l’amour et l’amitié dont nous sommes capables les uns envers les autres, dans tout ce qui est beau et bon mais aussi, dans ce qui ne l’est pas… Il n’existe pas de lieu spécifique où D.ieu résiderait car D.ieu est en toute chose. Einstein lui-même voyait dans le big bang et les lois de la physique quantique, la main de D.ieu, omniscient, omnipotent, absolu et relatif… La présence divine est partout et lorsque Salomon a érigé le premier temple, il a lui-même énoncé que D.ieu ne saurait résider dans la seule demeure qu’il venait d’édifier à son honneur (Rois, 8 :27). Aucun mikdash n’est donc un lieu unique, attachant D.ieu à résidence, mais il vient dire au peuple hébreu : N’oubliez jamais ! Sur le Sinaï a eu lieu le miracle, vous avez reçu les Tables de la Loi, non pas une fois, mais deux fois à cause de votre impiété. Ce Temple est là pour préserver les Tables et recevoir les holocaustes, les offrandes, séparer le sacré et le profane, tout en permettant au sacré d’être au cœur du peuple.

Mais c’est également l’assurance réelle et visible de l’Alliance, du lien forgé par D.ieu avec le peuple d’Israël. Quel que soit le lieu où résiderait le peuple, il dresserait au cœur du camp, au milieu d’eux, le temple, paré des plus beaux et précieux bois, métaux, tissus… pour qu’il n’y ai plus jamais de veau d’or.

Depuis la destruction du Temple de Jérusalem et la perte des Tables de la loi ainsi que des quatre objets sacrés, chaque synagogue est une extension du Mont Sinaï, où l’ensemble du peuple juif, reçoit la Loi de D.ieu…

Mélanie J.
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